Jean de la Fontaine
Une fable au hasard


 
Le Loup et le Chien maigre

Autrefois carpillon fretin
          Eut beau prêcher, il eut beau dire,
          On le mit dans la poêle à frire.
Je fis voir que lâcher ce qu'on a dans la main,
          Sous espoir de grosse aventure,
          Est imprudence toute pure.
Le pêcheur eut raison; carpillon n'eut pas tort
Chacun dit ce qu'il peut pour défendre sa vie.
          Maintenant il faut que j'appuie
Ce que j'avançai lors, de quelque trait encor.
Certain loup, aussi sot que le pêcheur fut sage,
          Trouvant un chien hors du village,
S'en allait l'emporter. Le chien représenta~
Sa maigreur: « Jà ne plaise à votre seigneurie
          De me prendre en cet état-là;
          Attendez: mon maître marie
          Sa fille unique, et vous jugez
Qu'étant de noce, il faut, malgré moi, que j'engraisse. »
          Le loup le croit, le loup le laisse.
          Le loup, quelques jours écoulés,
Revient voir si son chien n'est point meilleur à prendre;
          Mais le drôle était au logis.
          Il dit au loup par un treillis :
« Ami, je vais sortir; et, si tu veux attendre,
          Le portier du logis et moi
          Nous serons tout à l'heure à toi. »
Ce portier du logis était un chien énorme,
          Expédiant les loups en forme.
Celui-ci s'en douta. « Serviteur au portier »,
Dit-il; et de courir. Il était fort agile;
          Mais il n'était pas fort habile:
Ce loup ne savait pas encor bien son métier.

Livre IX, Fable X

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